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Face à la déferlante trumpiste, l’Europe comme les autres parties du monde n’ont d’autre choix que de repenser fondamentalement leur doctrine commerciale. Disons-le clairement : si l’Europe n’abandonne pas urgemment sa religion du libre-échange, elle court le risque d’un désastre social et industriel sans précédent. Le tout sans aucun bénéfice pour la planète, bien au contraire.
Pour fixer ses droits de douane, Donald Trump a suivi une logique étroitement nationaliste (l’excédent bilatéral avec les Etats-Unis) et passablement chaotique, au gré de ses changements d’humeur. Il faut faire tout le contraire : les droits de douane doivent être fixés sur la base de principes universalistes et prévisibles.
La première raison justifiant des droits de douane est que le transport international de marchandises entraîne des pollutions spécifiques (7 % des émissions mondiales). Les économistes ont longtemps minimisé ce coût environnemental en retenant une valeur réduite pour la tonne de carbone (entre 100 et 200 euros). Mais l’aggravation du réchauffement a conduit à revoir ces chiffres : on estime maintenant que les coûts entraînés par les émissions – catastrophes naturelles, baisses d’activité économique, etc. – avoisinent les 1 000 euros la tonne, voire davantage, sans même prendre en compte la perte de bien-être et les coûts non économiques. En retenant cette valeur, il faudrait appliquer des droits de douane moyens de l’ordre de 15 % aux flux commerciaux mondiaux afin de prendre en compte le réchauffement lié au fret, avec de fortes variations suivant les marchandises.
La seconde justification pour les droits de douane est le dumping social, fiscal et environnemental. Certains pays appliquent des règles moins exigeantes que d’autres, ce qui permet aux producteurs basés dans ces territoires d’évincer leurs concurrents.
Concrètement, la Chine pèse aujourd’hui pour 30 % des émissions mondiales, dont environ 20 % pour les émissions exportées (soit 6 % du total mondial). A 1 000 euros la tonne, il faudrait appliquer des droits de douane moyens d’environ 80 % aux exportations chinoises pour prendre en compte ce coût environnemental. Si on se limite aux émissions exportées nettes des émissions importées, soit environ 10 % des émissions chinoises (3 % du total mondial), on aboutit à des droits de douane de l’ordre de 40 %.
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15 commentaires
Les coûts environnementaux du transport sont trop souvent ignorés. C’est peut-être le moment de les intégrer dans les calculs.
Totalement d’accord, mais les entreprises seront-elles prêtes à payer le prix ?
Les principes universalistes et prévisibles sont essentiels, mais comment les appliquer dans un contexte aussi complexe ?
C’est le défi majeur des prochaines années.
Intéressant de voir comment le nationalisme économique influence désormais les politiques commerciales.
Cela pourrait mener à une guerre commerciale ouverte.
Le libre-échange a ses avantages, mais l’Europe doit peut-être trouver un équilibre pour protéger ses industries et son marché du travail.
Mais comment concilier cela avec les normes environnementales globales ?
Exactement, surtout face à des politiques Protectionnistes aussi impulsives.
Les droits de douane basés sur les émissions de CO2 pourraient être une solution, mais seront-ils vraiment efficaces à l’échelle mondiale ?
Difficile à dire, surtout avec des pays qui dépendent fortement du commerce international.
Repenser la doctrine commerciale est une nécessité, mais cela prendra du temps et des compromis.
Le temps presse, surtout avec l’urgence climatique.
L’Europe doit-elle vraiment suivre l’exemple de Trump, ou existe-t-il une voie plus intelligente ?
Certainement une voie médiane, mais laquelle ?