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Dix-sept mois. Voilà dix-sept mois qu’il est aux mains des autorités russes, loin de ses enfants, de son épouse, de ses parents et amis, livré à la solitude et aux interrogatoires répétés des agents du FSB, l’ex-KGB. Arrêté le 6 juin 2024 à la terrasse d’un café moscovite, dans une mise en scène complaisamment relayée par la télévision publique destinée à frapper de stupeur les chancelleries et l’opinion occidentales, Laurent Vinatier n’est pas un inconnu pour ceux qui s’intéressent de près à la Russie contemporaine.
Spécialiste reconnu de la Tchétchénie et de sa diaspora, ce Français de 49 ans travaille depuis plus de vingt ans sur l’espace post-soviétique, qu’il n’a cessé d’arpenter en qualité de chercheur puis, à partir de 2014, comme conseiller du Centre pour le dialogue humanitaire (HD), une organisation non gouvernementale basée en Suisse qui se consacre à la médiation en situations de conflits.
Dans le cadre des activités de diplomatie privée menées par HD, Laurent Vinatier avait été conduit ces dernières années à de fréquents séjours en Russie, mais aussi en Ukraine, au Tadjikistan, en Moldavie, en Biélorussie et dans le Haut-Karabakh. Partout, il s’est efforcé, conformément aux buts de l’organisation qui le mandatait et en toute transparence, d’ouvrir des canaux de dialogue entre belligérants, prenant part, pour ce faire, à des rencontres avec un large éventail d’acteurs.
Une cible de choix
Engagées dans un rapport de force avec l’Union européenne sur le dossier ukrainien, les autorités russes n’ignoraient rien de la nature diplomatique de ses interventions ni de la neutralité de son positionnement. Mais Laurent Vinatier, par son rôle sur le plan international et ses fréquents déplacements à Moscou, était pour elles une cible de choix et une prise facile. Accusé d’avoir recueilli des informations liées aux activités « militaires et militaro-techniques » et de ne pas s’être enregistré comme « agent de l’étranger », en vertu d’une loi d’abord réservée aux citoyens russes, et dont il ignorait l’extension récente aux ressortissants étrangers, Laurent Vinatier a finalement été jugé pour ce dernier motif. Alors que l’infraction qui lui était reprochée est généralement punie d’une simple amende, ce sont trois ans et trois mois de colonie pénitentiaire, soit la peine maximale encourue, qui lui ont été infligés le 14 octobre 2024.
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11 commentaires
Cette affaire souligne l’importance de rester vigilant sur les droits de l’homme, même avec les acteurs internationaux.
Quel rôle joue exactement le FSB dans cette détention prolongée ? Les raisons officielles sont-elles convaincantes ?
La répression en Russie semble s’étendre à tous les étrangers, même les chercheurs comme Laurent Vinatier. Une situation inacceptable.
C’est une situation très préoccupante, et la France doit effectivement tout mettre en œuvre pour ramener Laurent Vinatier sain et sauf.
Espérons que les négociations aboutissent rapidement.
17 mois de détention, c’est inadmissible. Comment les familles gèrent-elles cette attente insoutenable ?
Les soucis doivent être immenses pour les proches de Laurent Vinatier.
La France a-t-elle des leviers diplomatiques pour faire pression sur la Russie ?
Le Centre pour le dialogue humanitaire participe à des médiations sensibles, mais son travail est rarement médiatisé.
C’est un rappel tragique des dangers auxquels s’exposent les diplomates et chercheurs en zones de conflit.
Vraiment, ces missions doivent être mieux protégées.