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La légende veut que la rédaction en chef du New York Times au grand complet se soit rendue en 1972 au cinéma voir Gorge profonde de Gerard Damiano, le premier film pornographique à devenir un phénomène de société aux Etats-Unis. A Paris aussi, Le Monde s’est intéressé à un tel film, en l’occurrence le vrai-faux documentaire Exhibition, de Jean-Francois Davy (1945-2025), un succès de l’été 1975 avec pas loin de 2 millions de spectateurs. Le journaliste Bruno Frappat, futur directeur de la rédaction du quotidien puis de celle du journal catholique La Croix, fut dépêché à une séance.
A dire vrai, il ne s’agissait pas d’une première pour Le Monde. En 1974, un autre de ses journalistes, Jacques Siclier, avait poussé les portes, sur les grands boulevards de la capitale, d’un cinéma spécialisé. Un endroit particulier : projection permanente et jauge limitée pour un public d’hommes seuls, très seuls. Le film qui fait alors sensation chez les initiés, La Bonzesse (François Jouffa, 1974), brode sur la libération sexuelle d’une jeune femme sur fond de pseudo-sagesse orientale. Son succès s’explique avant tout par la rumeur selon laquelle il contiendrait des scènes de sexe non simulées.
Dans son article, Jacques Siclier invoque le célèbre Belle de jour (1967) de Luis Buñuel (1900-1983) pour mieux critiquer la nullité de ce type de production érotique. Mais il va plus loin : étrangement, il déplore que l’amour y soit simulé, qui plus est par de mauvais acteurs, comme s’il était courant de reprocher aux protagonistes d’un film violent de ne pas réellement s’entre-tuer.
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16 commentaires
Les cinéastes de l’époque prenaient-ils ces films au sérieux ou était-ce purement commercial ?
Ces films ont ouvert la voie à bien des débats sur la liberté d’expression.
Dommage qu’il n’y ait pas plus de détails sur le public visé par ces projections.
Un auteur du calibre de Bruno Frappat couvrant un tel sujet, c’est inattendu.
Un article fascinant qui montre à quel point le cinéma érotique a marqué son époque.
Absolument, et pas seulement au niveau du box-office.
Le Monde a toujours su aborder des sujets audacieux avec sérieux.
Une approche journalistique qui fait encore référence.
Je trouve intéressant de constater la place qu’occupait le cinéma érotique dans les médias.
Difficile d’imaginer aujourd’hui l’impact d’un tel film en 1975.
C’est vrai, les mentalités ont bien évolué depuis.
Je me demande comment les spectateurs de l’époque percevaient ces films.
Une question pertinente, la société était très différente alors.
Passant du porno au cinéma d’art, la frontière semble mince parfois.
Vous croyez ? Un débat passionnant.
C’est intéressant comme perspective.