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Il y a quarante-quatre ans, en septembre 1981, l’Assemblée nationale résonnait d’une voix dont le souffle puissant savait réveiller les consciences, éclairer les esprits, inspirer les âmes de la représentation nationale : Robert Badinter vibrait, tonnait, défendait avec force et passion l’abolition de la peine de mort.
Homme de combat, il fit de la lutte politique la plus noble des batailles, car ce qui l’animait n’était pas l’intérêt partisan, mais le parti de l’homme. Il avait foi en l’être humain. Il croyait en une certaine idée de l’Etat, source du droit, mais qui ne pouvait se les arroger tous ; il avait la conviction que la justice ne pouvait avoir recours à la violence, car c’était le moyen même qu’elle visait à éradiquer. Sa voix, la force de son argumentation, la puissance de ses convictions imposaient le silence et le respect à un hémicycle qui l’écoutait.
A l’époque, l’Assemblée nationale était encore un lieu de débats sereins, où l’affrontement des convictions n’empêchait pas le respect, et où l’on cherchait à faire avancer le pays. Nous n’étions pas du même bord, mais j’ai été fier de voter l’abolition de la peine de mort, le 18 septembre 1981. Et de poursuivre par la suite, un dialogue régulier et passionnant avec cet homme d’Etat français et européen.
Affaire de conscience
Son arme, c’était la voix ; son champ d’action, c’était la loi, qu’il brandissait pour lutter contre toute forme d’antisémitisme et de racisme, cette lèpre de l’humanité qu’il avait éprouvée dans sa chair et qu’il n’eut de cesse de dénoncer avec rage. Au soir de sa vie, voir les mêmes mots de haine que ceux qu’il voyait enfant, avant la guerre, inscrits à la craie sur les murs de son lycée parisien, le mettait hors de lui. Adhérer à l’antisémitisme et au racisme : une « absurdité criminelle », clamait-il. Crime contre les hommes et les femmes, crime contre la République, contre l’égalité, contre la fraternité, contre la laïcité.
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13 commentaires
Quelle différence entre son époque et la nôtre, où les témoignages de respect mutuel sont rares.
On avait peut-être plus de respect pour les adversaires politiques.
La politique gagnerait à retrouver son esprit d’échange et de débat constructif tel qu’il le pratiquait.
Les débats d’aujourd’hui manquent souvent de cette noblesse.
Le discours de Robert Badinter sur l’abolition de la peine de mort reste un moment historique dans l’histoire politique française.
C’était un débat où les convictions primaient sur les calculs politiques.
Tout à fait d’accord, un discours marquant qui a marqué les esprits.
On peut déplorer la disparition d’un grand orateur qui savait unir les Français au-delà des clivages.
En effet, sa capacité à convaincre était exceptionnelle.
Un homme qui a marqué l’histoire par ses paroles et ses actes.
Son héritage juridique reste inégalé.
Qu’aurait dit Robert Badinter face aux enjeux de justice actuelle, comme la réforme des retraites ou l’état d’urgence?
Difficile à dire, mais probablement avec la même éloquence et la même fermeté morale.