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Elles sont quatre. Quatre photos qui pourraient symboliser l’abolition de la peine de mort en France. Elles réunissent en une séquence – inédite – la guillotine et l’homme qui l’a définitivement mise au rebut, le 9 octobre 1981. C’est la première fois qu’elles sont publiées. Elles dormaient depuis près de quarante-quatre ans dans une commode en bois.
L’auteur de ces photos secrètes, c’est Mᵉ François Binet. Au début des années 1970, il était collaborateur au cabinet d’avocats de Robert Badinter et Jean-Denis Bredin. Puis il a arpenté avec le premier les cours d’assises pour éviter la guillotine à six hommes, entre 1977 et 1980. A Binet, l’analyse des dossiers, la préparation des procès, le travail de l’ombre ; à Badinter, les plaidoiries exaltées et le combat médiatique pour l’abolition. Leur amitié s’est nouée dans ces moments de fièvre judiciaire, marquée par l’hostilité parfois physique d’une opinion publique chauffée à blanc, et encore majoritairement favorable à la peine de mort.
Aujourd’hui, François Binet a 79 ans. La silhouette de l’avocat s’est arrondie et voûtée, mais la passion reste intacte quand il évoque ces années de lutte aux côtés de son mentor, « un second père ». Il reçoit dans son appartement de la banlieue parisienne orné de sculptures de déesses grecques et d’illustrations de Mucha. « Le temps est venu de les publier », estime-t-il, le regard porté sur ses photos : « Les gens doivent connaître la gravité de cette visite à la guillotine et l’horreur qu’elle était. La panthéonisation de Robert Badinter est le bon moment. » Un pacte tacite liait les deux hommes : ces photos devaient rester confidentielles. Mais à présent, avec l’accord d’Elisabeth Badinter, Mᵉ Binet accepte de les rendre publiques « à titre gracieux, pour l’histoire ! » et livre le récit de ce rendez-vous secret entre Robert Badinter et la guillotine.
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6 commentaires
Intéressant de voir comment des images peuvent raconter une transformation sociale majeure. Des clichés qui marquent l’esprit.
En effet, les images ont souvent plus de force qu’un long discours.
Un reportage poignant qui rappelle l’importance historique de ces images pour la justice française.
C’est une période clé de notre histoire juridique.
Tout à fait d’accord. Ces photos ont un poids symbolique énorme.
Un sujet qui rappelle l’impact des plaidoiries de Badinter et le rôle des documents patrimoniaux dans la mémoire collective.