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L’image est saisissante : Pierre Laval, concentré, sourire esquissé, pose dans un halo de lumière grise. La photographie date de 1941. L’ex-vice-président du Conseil dans le premier gouvernement du régime de Vichy s’est fait évincer par Philippe Pétain quelques mois plus tôt. Le principal artisan de la collaboration avec l’Allemagne nazie cherche à redorer son blason auprès de l’opinion publique. Ses portraits circulant dans la presse lui faisant un visage trop dur à son goût, il va chez Harcourt pour disposer d’un cliché qui le mettrait en valeur. Le studio lui offre le même traitement qu’aux acteurs qui ont fait sa renommée ; il l’éclaire, retouche les aspérités de son visage, tente de le magnifier. L’année suivante, Laval revient au pouvoir, en tant, cette fois, que chef du gouvernement de Vichy.
Ce cliché est mis en avant dans l’ouvrage Harcourt. Les années noires et grises, un studio photo sous l’Occupation, de Nicolas Ragonneau et Bénédicte Vergez-Chaignon (Denoël, 2025). « Noires et grises » car, au-delà des nombreuses célébrités (Gérard Philipe, Arletty, Charles Aznavour, Edwige Feuillère…) photographiées par le célèbre studio, des personnages d’un autre genre apparaissent pendant les années de guerre : figures politiques du gouvernement de Vichy, collaborateurs notoires, diplomates allemands, officiers de la SS ou de la Luftwaffe…
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12 commentaires
Intéressant de voir comment le Studio Harcourt a été utilisé pour façonner l’image de figures controversées pendant la guerre.
Oui, c’est un aspect méconnu de l’histoire, surtout dans le milieu artistique.
Les artistes sollten-ils refuser de collaborer avec de telles personnalités ?
Ce livre semble plonger dans une époque complexe où l’art a été instrumentalisé à des fins politiques.
Absolument, et cela soulève des questions éthiques très actuelles.
L’image de Laval par Harcourt montre à quel point la propagande a infiltré tous les domaines, y compris l’art.
C’est vraiment troublant, et un sujet qui mérite d’être approfondi.
Comment concilier l’art et la morale, surtout pendant les périodes sombres ?
Ces ‘années noires et grises’ du Studio Harcourt méritent d’être étudiées sans tabou.
Parfois, regarder en face les zones d’ombre de notre passé est la seule façon d’avancer.
Les photos du Studio Harcourt constituent un fonds inestimable, même si certaines posent problème.
C’est pour ça que l’historiographie est toujours nécessaire, surtout quand elle concerne des célébrités.