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En devenant pape le 8 mai, Léon XIV a dû, comme ses prédécesseurs, assumer l’histoire longue et complexe de l’Eglise catholique. L’exhortation apostolique Dilexi te (« Je t’ai aimé »), qui paraît aujourd’hui, constitue le texte inaugural de son pontificat, et marque de quelle manière il s’inscrit dans cette histoire.
D’abord, la continuité avec le pontificat de François est évidente, puisque Léon XIV a complété et publié un texte préparé par son prédécesseur – son titre rappelle d’ailleurs celui de la quatrième et dernière encyclique du pape argentin, Dilexit nos (« Il nous a aimés »).
Surtout, c’est toute l’histoire du christianisme, depuis la Bible hébraïque jusqu’aux dernières décennies, qui est relue par Léon XIV à l’enseigne de l’attention réservée aux plus pauvres. On y croise de grandes figures inspirantes – Augustin d’Hippone, François d’Assise – autant que de multiples chrétiens anonymes, « témoins d’une Eglise qui sort des sentiers battus ».
Cette relecture sert un objectif : le pape appelle l’Eglise catholique à se tenir à la hauteur de sa propre histoire, en vivant un réel engagement prioritaire aux côtés des plus pauvres. Le rapport que le pape entretient avec l’histoire qu’il raconte, dans laquelle il situe l’engagement des femmes autant que celui des hommes, n’est pas neutre : cette histoire, explique-t-il, oblige l’Eglise catholique. Une telle conviction se fraie un chemin entre deux bords opposés, plusieurs fois éreintés dans le texte.
Double dénonciation
D’un côté, l’ultralibéralisme, visé par les réflexions sur l’accumulation de richesses, sur le culte de la réussite individuelle ou la liberté du marché. Les arguments du pape sont moins économiques qu’anthropologiques : il dénonce des croyances illusoires comme le ruissellement des richesses, autant qu’un aveuglement difficile à briser, comme celui qui empêche de s’alarmer d’inégalités qui deviennent des « déséquilibres dramatiques ». On trouve ainsi des propos cinglants sur « la croissance de certaines élites riches qui vivent dans une bulle de conditions très confortables et luxueuses, presque dans un autre monde par rapport aux gens ordinaires ».
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17 commentaires
Ce texte pourrait marquer le début d’un nouveau chapitre pour l’Eglise, centré sur la justice sociale. Le monde en a bien besoin en ces temps incertains.
Reste à voir si les hautes sphères de l’institution suivront cette dynamique.
Encourager l’Eglise à s’engager davantage aux côtés des défavorisés est louable. Reste à savoir comment les fidèles et les institutions vont réagir à cet appel.
La mise en œuvre sera le véritable test de cette exhortation.
Relire l’histoire du christianisme sous l’angle de la solidarité envers les pauvres est une initiative courageuse. Espérons que ces paroles se traduisent en actes concrets.
Les mots ne suffisent pas, mais c’est un pas dans la bonne direction.
Un message politique, vraiment ? Plutôt une exhortation morale avec des implications politiques. C’est toute la nuance qu’il faut saisir.
Touché, l’angle politique est plus subtil que ce que le titre suggère.
L’évocation de figures historiques comme Augustin et François d’Assise renforce le message. Une belle manière de mêler tradition et engagement contemporain.
C’est un équilibre difficile à maintenir, mais nécessaire dans un monde en mutation.
La mention des chrétiens anonymes invite à refléter sur l’humilité et le service. Un rappel salutaire dans un monde souvent obsédé par les apparences.
L’Eglise a parfois besoin qu’on lui rappelle ses racines les plus authentiques.
Un pape qui s’adresse aussi directement à la société civile et aux dirigeants politiques, voilà qui est rare. Souhaitons que cela ait un impact réel.
Il faudrait voir quelles mesures concrètes suivront ce discours.
Ce message politique du pape Léon XIV semble marquer un tournant dans son approche pastorale, en insistant sur les pauvres. Intéressant de voir comment il s’inspire du pape François.
Effectivement, cette continuité avec le précédent pontificat est frappante, et pour le mieux, à mon avis.
Pourquoi pensez-vous qu’il s’agit d’un tournant ? Peut-être juste une consolidation des enseignements antérieurs.