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Début septembre, la presse a révélé deux projets de décret visant à réformer l’aide médicale d’Etat (AME), qui permet aux personnes étrangères en situation irrégulière d’accéder aux soins. Ces textes prévoient de durcir les conditions d’octroi du dispositif, en restreignant les pièces permettant de justifier de son identité, en intégrant les ressources du conjoint en séjour régulier dans le calcul d’éligibilité, mais aussi en réduisant encore le panier de soins.
Ces annonces, dévoilées à la veille d’échéances politiques importantes, semblent davantage guidées par des calculs électoraux que par des considérations de santé publique. Bien que ces projets de décret aient été provisoirement suspendus avec la démission du gouvernement Baytou, la rencontre, le 23 septembre, entre le premier ministre d’alors, Sébastien Lecornu [qui a démissionné le 6 octobre], et les auteurs du rapport de décembre 2023 sur l’AME (Claude Evin et Patrick Stefanini) est un signal laissant craindre une volonté persistante de réforme de ce dispositif.
Une fois encore, l’AME est instrumentalisée, au prix de la santé de personnes particulièrement vulnérables. Pourtant, toutes les évaluations réalisées montrent que les réformes du dispositif n’ont aucune efficacité prouvée sur le contrôle migratoire. Leurs conséquences négatives sur la santé des patients et sur le fonctionnement de notre système de soins, elles, sont bien connues.
Grave régression
En tant que soignants, nous rappelons que l’accès aux soins est un droit humain fondamental, inscrit dans les engagements internationaux de la France et au cœur de notre éthique professionnelle. L’AME n’est pas une faveur, mais un dispositif de santé publique qui protège l’ensemble de la société. Empêcher une partie de la population de se soigner, c’est provoquer des complications médicales évitables et des coûts plus lourds pour les hôpitaux. Dans un système de santé déjà fragilisé, ces reports d’activité ne peuvent qu’aggraver la crise hospitalière.
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15 commentaires
L’AME est un dispositif complexe qui demande effectivement une révision. Mais cette révision doit être faite en concertation avec les acteurs de terrain.
Exactement, les décisions prises à la hâte sans consultation risquent d’aggraver les inégalités.
Les évaluations indépendantes montrent que l’AME coûte moins que le coût social d’une population non soignée. Faut-il vraiment prendre des risques sanitaires ?
La santé publique devrait toujours primer sur les calculs politiques.
Ces projets de décret montrent un manque cruel de compassion. La solidarité ne doit pas être une variable d’ajustement.
Les personnes en situation irrégulière ne reçoivent souvent pas les soins dont ils ont besoin. Réduire l’AME ne fera qu’aggraver cette situation.
On parle de révision, mais ces propositions ressemblent davantage à des restrictions. Le langage utilisé est alarmant.
Comment des réformes de cette envergure peuvent-elles être préparées dans l’urgence, sans débats approfondis ?
Cette précipitation donne l’impression que la santé des plus vulnérables est un enjeu secondaire.
L’AME protège aussi la communauté en évitant la propagation de maladies. Quitter ce dispositif serait une grave erreur de santé publique.
Triste de constater que des enjeux de santé publique soient instrumentalisés pour des stratégie politiques court-termistes. L’AME est essentielle pour des milliers de personnes.
Les réformes doivent être basées sur des données, pas sur des émotions électoralistes.
Tous les systèmes de santé ont besoin de moyens supplémentaires. Réduire l’accès aux soins n’est certainement pas la solution.
Pourquoi diantre s’attaquer à l’AME et non aux abus du système bancaire ou aux fraudes fiscales bien plus coûteuses ? Les priorités sont floues.
Les frais médicaux des sans-papiers sont largement compensés par les cotisations sociales payées par d’autres. La logique éconimque n’est pas ici.