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Nous sommes cinéastes. Nous tournons dans des villes, des villages, des quartiers populaires. Nous filmons des visages inconnus comme des acteurs reconnus. Nous racontons des histoires, des territoires, des passions et des émotions. Si nous pouvons le faire, c’est grâce à un modèle unique au monde : celui que porte le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).
Alors que le projet de loi de finances est examiné, ce modèle est attaqué. Des amendements proposent de réduire ou de supprimer le CNC, présenté comme une « gabegie » ou un financeur de « films non rentables ». Nous, cinéastes, voulons rappeler quelques faits simples : c’est notre souveraineté culturelle et l’accès de tous aux œuvres qui sont en jeu.
Le CNC ne coûte pas un euro au budget de l’Etat. Il est financé par le cinéma lui-même, via les billets de cinéma, les abonnements des plateformes, les recettes publicitaires et les fournisseurs d’accès : un modèle vertueux dans lequel chaque séance contribue à financer les films de demain – sans solliciter l’impôt des Français.
Un réseau unique au monde
Ce choix, soutenu de manière transpartisane, remonte à l’après-guerre : il visait à garantir à la France une indépendance de création face à des industries étrangères déjà dominantes. Aujourd’hui encore, il demeure l’un des rares outils qui permettent à un pays européen de ne pas abandonner son imaginaire et la figuration de son réel aux seules grandes plateformes et aux majors extra-européennes.
L’autre pilier de ce modèle, le crédit d’impôt, n’est pas un « luxe culturel », mais une politique industrielle stratégique. Un euro de dépense fiscale génère plusieurs euros de dépenses en France. Derrière chaque film, il y a des auteurs, des techniciens, des artistes (plus de 200 000 emplois directs), mais aussi des centaines de métiers qui en bénéficient : hôteliers, restaurateurs, transporteurs, commerçants…
Le CNC protège également un bien commun essentiel : l’accès de tous au cinéma, indépendamment d’un abonnement, d’un équipement ou d’un algorithme. Grâce à lui, la France dispose d’un maillage de plus de 6 300 écrans, des multiplexes aux salles de village, des cinémas de quartier aux circuits itinérants. Ce réseau unique au monde permet à chacun, en ville comme en zone rurale, d’entrer dans une salle pour quelques euros, sans filtre numérique. La salle de cinéma est un lieu collectif, accessible et intergénérationnel.
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12 commentaires
Le CNC est un modèle unique qui garantit la diversité du cinéma français. Réduire ses financements serait une grave erreur pour notre culture.
Prenons l’exemple des films d’auteur qui ne font pas de gros revenus, comment survivront-ils ?
Toutefois, ne faudrait-il pas une réforme pour s’adapter aux nouvelles plateformes numériques ?
Un système très bien rôdé financé par les revenus du cinéma, mais est-il vraiment efficace en période de crise ?
Le milieu du cinéma traverse déjà des moments difficiles, une réforme risquerait d’aggraver la situation.
Pourquoi attaquer le CNC alors qu’il est autofinancé ? Ce sont les spectateurs qui paient, pas les contribuables.
Mais ne devrait-on pas revoir les critères de financement pour mieux répondre aux attentes des publics ?
Les cinéastes ont raison : c’est bien notre patrimoine culturel qui est en jeu. Protéger le CNC, c’est protéger notre indépendance artistique.
Mais comment concilier cela avec les contraintes budgétaires actuelles ?
Ce modèle français mérite d’être défendu, car il permet à tous d’accéder à une culture riche et diversifiée.
Le CNC n’est pas un fardeau pour l’État, mais il est indispensable pour la production de films variés et accessibles.
Pourtant, certains considèrent qu’il favorise des films peu rentables plutôt que des blockbusters populaires.