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Dans son édition du 5 octobre, Le Monde a publié des extraits du Vertige du doute (Les Arènes), le livre-enquête de la journaliste Sophie Tardy-Joubert sur le syndrome du bébé secoué, un sujet délicat. Après avoir assisté à de nombreux procès, l’autrice fait part de son malaise et met en doute la parole des experts. « Le débat m’a semblé interdit, confisqué. Suspect, donc », écrit-elle notamment.
Pour éclairer ce débat, nous, pédiatres, chercheurs, médecins, souhaitons rappeler un certain nombre de points. La maltraitance envers les enfants est malheureusement une pratique courante, qui a fait l’objet de déni à travers les siècles. Les conséquences sur la vie de l’enfant peuvent pourtant être très graves, jusqu’à entraîner son décès.
Nous savons que l’absence de diagnostic de maltraitance conduit à un risque de répétition des violences, qu’il s’agisse de lésions traumatiques cutanées, de fractures par manipulations forcées, de lésions cérébrales par traumatisme crânien infligé, de lésions traumatiques abdominales provoquées par des coups de pied ou des saisies violentes de l’enfant souvent très jeune, pour ne parler que des violences physiques. La notion d’enfant maltraité a pris une envergure internationale avec l’adoption, par l’Assemblée générale des Nations unies, le 20 novembre 1989, d’une Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE).
Un seul test ne suffit jamais
Le diagnostic de maltraitance est toujours évoqué devant l’ensemble du contexte médical, en éliminant parallèlement toutes les autres causes possibles des lésions observées. Un seul test ne suffit jamais. Chez le nourrisson, c’est toujours une équipe pluridisciplinaire qui pose le diagnostic et émet, s’il y a lieu, un signalement judiciaire. L’expertise médico-légale prend place dans un second temps et a pour objectif d’éclairer le magistrat instructeur.
Ainsi, les cas arrivant aux assises sont toujours passés par le prisme de plusieurs médecins spécialistes travaillant en collégialité. Rappelons qu’en France l’expert judiciaire est indépendant des parties, contrairement au droit de la common law, où l’expert est affilié à une des parties.
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17 commentaires
Le risque de répétition des violences est un puissant argument en faveur d’une action urgente.
Les services sociaux doivent être mieux équipés pour intervenir rapidement.
La maltraitance infantile n’est pas qu’une affaire médicale, c’est une question de société. Comment engager un changement durable ?
L’éducation dès le plus jeune âge et l’accompagnement des parents sont des piliers incontournables.
Les conséquences de la maltraitance infantile peuvent être irréversibles. Comment améliorer le diagnostic précoce ?
Des protocoles clairs et une collaboration renforcée entre les professionnels de santé sont indispensables.
Ces chiffres sont alarmants. Il est crucial de renforcer les mesures de prévention et de sensibilisation pour protéger les enfants.
Combien de cas sont signalés chaque année en France?
Tout à fait d’accord. La formation des professionnels de santé est également essentielle.
Le livre de Sophie Tardy-Joubert soulève des questions importantes. La parole des experts doit-elle toujours être remise en question ?
La remise en question est nécessaire pour éviter les erreurs judiciaires graves.
Les pédiatres et les chercheurs appellent à une meilleure reconnaissance des signes de maltraitance. Pourquoi ces alertes sont-elles si souvent ignorées ?
La méconnaissance des symptômes et la peur de porter atteinte à la vie familiale en sont souvent les causes.
La maltraitance infantile est un fléau sous-estimé. Il faut agir rapidement pour briser le cercle vicieux des violences.
Absolument. Les campagnes de prévention doivent cibler l’ensemble de la société.
Un débat interdit ? La parole des experts est-elle réellement confisquée comme le suggère l’autrice ?
Il existe des résistances systématiques à admettre la maltraitance, par crainte des sanctions sociales.