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« A quel moment je vous ai donné mon consentement ? Jamais ! », a lancé, mercredi 8 octobre, Gisèle Pelicot à Husamettin Dogan, accusé de l’avoir violée, qui venait de réaffirmer devant la cour d’assises d’appel du Gard, à Nîmes, ne pas considérer avoir commis un viol. « Assumez vos actes et arrêtez de vous cacher derrière votre lâcheté ! », a vigoureusement répliqué celle qui est devenue un symbole des violences sexuelles faites aux femmes au seul accusé de l’affaire des viols de Mazan à avoir fait appel de sa condamnation.
Depuis lundi, ses entrées et sorties de la cour d’assises d’appel du Gard sont couvertes d’applaudissements, hommage populaire à une femme qui a redit mercredi : « Que les victimes n’aient jamais honte de ce qu’on leur a imposé par la force. »
« J’ai le sentiment d’être allée au bout de cette épreuve qui a duré cinq ans. Je souhaite ne jamais retourner dans un tribunal de ma vie. Moi, le mal est fait, il va falloir que je me reconstruise sur cette ruine. Je suis en bonne voie », a expliqué Gisèle Pelicot. Puis d’ajouter : « Bien évidemment, M. Pelicot est responsable de ma souffrance, mais M. Dogan et les 50 autres aussi. » « La seule victime, c’est moi ! En aucun cas vous n’êtes victime de M. Pelicot, assumez votre acte, j’ai honte pour vous ! »
Malgré la diffusion de vidéos accablantes, Husamettin Dogan a redit mercredi avoir été « piégé » par Dominique Pelicot, qui l’aurait « menacé ». « Pour moi, je n’ai pas commis de viol », a continué d’affirmer l’accusé de 44 ans. « J’ai fait un acte sexuel, j’ai jamais violé personne », « C’est lui le manipulateur, c’est pas moi. C’est lui qui m’a attiré là-bas. »
Disant avoir été « sous l’emprise » de Dominique Pelicot, il explique être resté car il se sentait menacé. « Moi, je voulais arrêter. A un moment, j’ai eu beaucoup de suspicion. J’ai continué car il m’a mis en confiance : “On t’a invité, on est conscients, on est d’accord.” Ce type, c’est un manipulateur ! »
14 vidéos projetées
Une ligne de défense fragilisée par les 14 vidéos de quelques secondes projetées dès l’ouverture de l’audience. On y voit l’accusé réaliser plusieurs actes sexuels sur Gisèle Pelicot, en sous-vêtements, portant des sandales et parfois un bandeau sur les yeux mais totalement inerte et ronflant. Outre ces ronflements parfois forts, Husamettin Dogan et Dominique Pelicot chuchotent pour éviter de la réveiller. A aucun moment la victime ne manifeste la moindre activité.
Sur l’une d’elles, Dominique Pelicot bascule en retrait la tête de son ex-épouse afin de faciliter une fellation forcée d’Husamettin Dogan, qui ne paraît nullement hésitant à réaliser son acte. Enfin sur une autre, l’accusé, bien reconnaissable de face, fait un geste à M. Pelicot pour lui demander de décaler la jambe de la victime afin de faciliter sa pénétration.
Avant leur projection, le président de la cour, Christian Pasta, avait invité « les personnes qui seraient sensibles à ce genre d’images à quitter la salle », notamment « le jeune public », avertissant : « Les images que vous allez voir sont très avilissantes pour la gent féminine. »
En tout, 107 photos et 14 vidéos de cette soirée du 28 juin 2019, lors de laquelle Husamettin Dogan s’était rendu à Mazan (Vaucluse), ont été retrouvées sur un disque dur de Dominique Pelicot. Condamné en première instance à neuf ans de prison, il risque en appel à Nîmes à nouveau la peine maximale de vingt ans de réclusion.
3 commentaires
Dommage que ce témoignage cruciale n’ait pas lieu dans un contexte plus large, comme une réforme judiciaire pour mieux protéger les victimes à l’avenir.
Ce procès est un souvenir poignant de la lutte contre les violences sexuelles. Le courage de Gisèle Pelicot est admirable.
Quelle puissance dans ses mots, quelle clarté face à un accusé qui s’accroche aux mensonges. Un véritable exemple de résilience.