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Les comités locaux ont commencé, dimanche 5 octobre en Syrie, à désigner une partie des membres du premier Parlement de l’ère post-Assad, dans un processus critiqué pour son manque de démocratie, un tiers des membres étant nommés par le président intérimaire Ahmed Al-Charaa.
La formation de ce Parlement devrait consolider le pouvoir d’Ahmed Al-Charaa, arrivé à la tête d’une coalition islamiste qui a renversé Bachar Al-Assad en décembre 2024, après plus de treize ans de guerre civile.
Les résultats préliminaires devraient être connus dans la foulée, la télévision d’Etat syrienne ayant annoncé que les bulletins commençaient à être comptés à certains endroits. La liste définitive des noms sera annoncée lundi.
Deux provinces du nord-est de la Syrie, sous contrôle des Kurdes, ainsi que celle à majorité druze de Soueida, théâtre de récentes violences, sont exclues du processus. Trente-deux sièges, sur 210, resteront ainsi vacants à l’issue de cette consultation dans laquelle les femmes sont sous-représentées.
Le futur Parlement dont le mandat, renouvelable, est de deux ans et demi, comptera 140 membres désignés par des comités locaux formés par la commission électorale nommée par M. Al-Charaa, et 70 nommés par le président intérimaire. Selon la commission électorale, 1 578 candidats, dont seulement 14 % de femmes, devront être départagés par près de 6 000 personnes.
Un processus de désignation critiqué
Le processus de désignation est critiqué par des organisations de la société civile qui dénoncent une concentration excessive des pouvoirs entre les mains du président et un manque de représentativité des composantes ethniques et religieuses du pays.
Dimanche lors d’un discours devant les membres de la commission électorale à Damas, Al-Charaa a insisté sur le caractère « transitoire » du processus « lié aux circonstances que traverse la Syrie ».
Il avait affirmé en septembre qu’il était impossible pour le moment d’organiser des élections au suffrage direct, arguant notamment que la présence d’un grand nombre de Syriens à l’étranger sans documents en règle compliquait la situation.
Des centaines de milliers de Syriens ont fui la guerre déclenchée en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie, qui a fait plus d’un demi-million de morts. Les nouvelles autorités ont dissous l’Assemblée du peuple, simple chambre d’enregistrement du pouvoir sous le clan Al-Assad pendant des décennies.
Le nouveau Parlement exercera les fonctions législatives jusqu’à l’adoption d’une Constitution permanente et la tenue de nouvelles élections, selon la Déclaration constitutionnelle proclamée en mars.
« Ce ne sont pas des élections, c’est une nomination », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Bassam Al-Ahmad, le directeur exécutif de l’ONG Syriens pour la vérité et la justice, basée à Paris. Dans un communiqué diffusé mi-septembre, 14 ONG ont estimé que le processus permettait au président de « constituer une majorité parlementaire à partir de personnes dont il garantit la loyauté », ce qui pourrait « saper le principe de pluralisme ».
« Il est normal qu’il y ait des critiques, le gouvernement est nouveau au pouvoir, et la liberté est nouvelle pour nous », reconnaissait une candidate, Mayssa Halwani, 48 ans, lors d’une réunion de la commission électorale à Damas cette semaine.
Les candidats ne doivent pas être « des partisans de l’ancien régime, ni promouvoir la sécession ou la partition » du pays, selon les règles électorales. « Les élections auraient pu constituer un nouveau départ politique après la chute de l’ancien régime, mais la marginalisation de nombreuses régions montre que les règles de la participation politique ne sont pas respectées », déplore Nichan Ismaïl, un instituteur de 40 ans du nord-est, sous contrôle kurde.
13 commentaires
Ahmed Al-Charaa consolide son pouvoir rapidement. On peut se demander si ce Parlement sera vraiment indépendant ou simplement un outil pour légitimer son autorité.
C’est une question légitime. L’histoire montre que les institutions politiques souvent deviennent des marionnettes du pouvoir exécutif.
Étonnant de voir que des sièges resteront vacants à cause de l’exclusion de certaines provinces. Cela montre à quel point le processus est partial.
C’est un élément révélateur des problèmes structurels dans ce pays, où certaines minorités sont systématiquement marginalisées.
Ce processus électoral en Syrie est très critiqué, notamment pour son manque de transparence. Comment peut-on considérer cela comme démocratique quand un tiers des membres sont nommés directement ?
C’est exactement le problème. Sans élections libres et équitables, ce Parlement n’aura aucune légitimité.
La situation en Syrie reste complexe. On peut se demander si ces élections serviront vraiment les intérêts du peuple ou uniquement ceux du pouvoir en place.
La télévision d’État syrienne annonce déjà les premiers résultats. Quiconque suit la situation sait qu’elle est contrôlée par le pouvoir en place, donc ces résultats sont à prendre avec des pincettes.
Totalement d’accord. La médiatisation du processus électorale est souvent biaisée pour donner l’illusion de la démocratie.
La guerre en Syrie a laissé des séquelles profondes. Ce Parlement pourrait-il vraiment apporter la stabilité et la paix tant espérées ?
C’est peu probable, tant que les divisions régionales et ethniques ne seront pas résolues.
Intéressant de voir comment la Syrie tente de se reconstruire après des années de guerre civile. Cependant, l’exclusion de certaines régions et la sous-représentation des femmes sont des points préoccupants.
Tout à fait, cela montre les divisions qui persistent dans le pays. La réconciliation nationale semble encore loin.