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A Khartoum, il n’est pas rare d’être enterré deux fois. Dans la cour d’une école, résonnent des coups de pioche. Puis les zips de sacs mortuaires qu’on referme prestement. Se tenant à l’écart, des pleureuses sont venues verser les larmes qui n’ont pas pu couler plus tôt. Ici, un commerçant prénommé Abdelmoneim, mort d’une crise cardiaque, est exhumé. Là, « un Ethiopien » à l’identité inconnue, tué d’une balle perdue en pleine rue. Le troisième ? Personne n’en sait rien.

Ceux-là seront ensevelis dans une section à part, un os en moins – prélevé pour l’ADN. « On les conserve au cas où des familles recherchent leurs disparus », indique le docteur Hisham Zein El-Abdeen. Sous la supervision de l’autorité de médecine légale de l’Etat de Khartoum, plus de 15 000 corps ont été déterrés du ventre de la capitale depuis sa reprise par l’armée régulière en mars. Identifiés ou non, ils sont remis en terre dans les cimetières attenants.

Les fossoyeurs ont encore des mois devant eux pour passer au peigne fin chaque quartier, à la recherche des vies englouties par la ville. Epicentre de la guerre depuis les premiers affrontements entre les deux armées du Soudan, le 15 avril 2023, Khartoum est restée pendant près de deux ans la principale ligne de front. Cernés par les combats, ses habitants ont souvent été contraints d’inhumer leurs morts à la hâte, enfouis dans les jardins, les cours des mosquées ou au bord des routes.

« On a tout vu »

Aux portes de l’école primaire de Hay El-Zuhour, le « quartier des fleurs », des voisines regardent passer le funeste cortège. Elles sont de ceux qui ne sont jamais partis. « On a tout vu. Les drones, les obus, les pluies de balles, les miliciens qui pénètrent chaque maison, qui te menacent, te pillent », énumère Hannan Adam, la sœur du défunt Abdelmoneim. Pendant près de deux ans, sous le joug des Forces de soutien rapide (FSR), ces habitants sont restés terrés chez eux, ne sortant « jamais plus loin que le coin de la rue ».

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8 commentaires

  1. C’est surprenant de voir comment Khartoum tente de reconstruire après tant de destructions. J’espère que les familles trouveront enfin la paix.

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