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D’ordinaire, les historiens et les philosophes sont légion dans les colloques sur les Lumières. Désormais, il arrive que des mathématiciens et des informaticiens s’y infiltrent. « Les humanités numériques utilisent les outils des sciences dures, mais cela n’en fait pas moins une science interprétative », justifie le maître de conférences en humanités numériques Christophe Schuwey, qui a animé avec ses consœurs Flora Amann et Servanne Monjour le colloque international Interfaces des Lumières. (Dé) constructions numériques d’un héritage, les 9 et 10 octobre à la Sorbonne, à Paris.
A l’ère des big data, les recherches d’ampleur avancent d’autant plus vite qu’on travaille à gagner du temps. En effet, la lecture des 100 000 textes du seul XVIIIe siècle mis en ligne par The ARTFL Project, hébergé par l’université de Chicago, prendrait plusieurs vies. Les outils de recherche qui y sont intégrés, présentés lors du colloque par l’un des responsables du projet, Clovis Gladstone, permettent entre autres de mettre au jour les liens d’intertextualité de manière automatique.
Néanmoins, les outils numériques peuvent parfois appauvrir notre compréhension des Lumières, note Nicolas Rieucau, spécialiste de Condorcet, qui met en garde contre la disparition de la matérialité des sources. Il ne faut pas céder à une approche facile, « brute et aveugle », alerte aussi Christophe Schuwey : « L’informatique ne règle pas tout. » De sorte que les digital humanists, comme l’universitaire se définit lui-même, ne peuvent se soustraire à une constante réflexion sur leurs outils : quels énoncés vrais est-il possible de déduire de tel ou tel résultat ?
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7 commentaires
Quels sont les bénéfices concrets pour les chercheurs en utilisant ces techniques numériques ? Des gains de temps, mais quel impact sur la qualité des analyses ?
L’idée est d’accélérer la recherche tout en gardant une marge d’interprétation. L’équilibre reste délicat mais essentiel.
Les Lumières étaient déjà un thème riche en émotions. L’analyser via des données risque de brouiller la perception authentique.
Vous avez raison, les émotions des auteurs du XVIIIe siècle méritent une lecture humaine. Les chiffres ne peuvent tout refléter.
Intéressant d’explorer comment les outils numériques révolutionnent l’étude des Lumières. J’aurais aimé en savoir plus sur les critiques des méthodes traditionnelles face à cette approche technologique.
C’est vrai que le débat sur la perte de sens dans l’analyse automatisée est crucial. Les humanistes doivent garder le contrôle sur l’interprétation.
Certains académiciens craignent que l’algorithme ne remplace pas le contexte historique. Une discussion nécessaire pour préserver l’essence des textes.