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Le parquet général a requis treize ans de réclusion criminelle, samedi 15 novembre, contre l’avocat Alex Ursulet, figure du barreau parisien, pour le viol d’une stagiaire à son cabinet en janvier 2018.

Avant un verdict dans la soirée, la défense d’Alex Ursulet a répété sa protestation d’innocence, et demandé à la cour criminelle de Paris de prononcer l’acquittement au nom d’un « doute plus que raisonnable ». Le crime poursuivi est passible de vingt ans de réclusion.

« Il y a dans cette salle quelqu’un qui ment. Qui de la stagiaire ou du maître de stage ? », a commencé l’avocat général Philippe Courroye. Question rhétorique à laquelle il a répondu près de trois heures plus tard en demandant l’incarcération d’Alex Ursulet : « Le mensonge, il est de ce côté de la barre. » « Il n’y a pas de complot », a-t-il dit ; la jeune femme, alors âgée de 25 ans, « a bien été victime d’un viol » commis par pénétration vaginale digitale, « sorte de droit de cuissage ».

Avec la circonstance aggravante qu’ils l’ont été par une personne ayant autorité, les faits ont été commis sous la « contrainte » et par « surprise » dans le huis clos du cabinet d’Alex Ursulet l’après-midi du 30 janvier 2018, trois semaines après le début du stage, a poursuivi le magistrat.

Alex Ursulet a écouté l’implacable charge, tantôt soutenant d’un regard incrédule celui du magistrat, tantôt le détournant, mais haussant parfois des sourcils désapprobateurs ou secouant la tête.

« Sentiment d’impunité »

Dans cet affrontement parole contre parole, le magistrat a mis en miroir les « contradictions » et les « incohérences » de l’accusé avec une plaignante « constante dans ses déclarations ». Il a salué sa décision de s’engager dans « le chemin de croix des victimes » en portant plainte et sa « force pour dénoncer ces faits criminels », jeune stagiaire face à un ténor du barreau plus âgé de trente-cinq ans, ex-associé de Jacques Vergès, un temps compagnon de route de la droite gaulliste, qui a accédé à la célébrité pour avoir défendu le tueur en série Guy Georges.

Philippe Courroye a fustigé « le sentiment d’impunité » de l’avocat, à la « personnalité dominatrice », qui se pensait « protégé de la cuirasse de sa superbe ». Après une période de « séduction » avant le stage, il aurait instauré une relation empreinte de « domination », avant d’engager une phase de « possession », celle du viol.

Jeudi, la plaignante, devenue avocate, avait raconté en détail le viol et sa « sidération ». Le crime serait survenu après un déjeuner au restaurant à l’initiative de l’avocat, au cours duquel la conversation aurait dévié sur sa sexualité. « Quand elle pousse la porte du cabinet » trois semaines plus tôt, « elle vient pour apprendre » un métier « dont elle a rêvé depuis longtemps », aux côtés d’un ténor qu’elle « idéalise ». Ce n’était « pas pour répondre à des questions sur sa sexualité », « encore moins pour être » violée, poursuit Philippe Courroye.

Quant au délai de plusieurs mois avant sa plainte, son explication est « d’une extrême banalité » : « la crainte d’être discréditée dans la profession », « de ne pas être crue », « de se griller ». Le magistrat se tourne vers l’accusé : « C’est la robe d’avocat que vous avez souillée », lui dit-il, en fustigeant sa « position victimaire » durant une audience où il a « chanté l’air de la calomnie ».

« Doute plus que raisonnable »

« J’ai eu le sentiment que votre réquisitoire était écrit » avant les débats, a rétorqué Fanny Colin, dont le client avait évoqué dans la semaine la thèse d’une volonté de lui nuire par dépit professionnel. Pour condamner, « il vous faut une certitude à la hauteur » de la peine demandée, et dans ce dossier « il existe un doute plus que raisonnable », a-t-elle plaidé.

Quand Alex Ursulet a toujours nié une quelconque relation d’ordre sexuel, sa défense a esquissé samedi l’hypothèse d’une « relation malheureuse dominant-dominée dans laquelle » la plaignante serait rentrée de son plein gré, selon Luc Brossollet. Et « plutôt deux fois qu’une si j’en crois les SMS », a poursuivi l’avocat.

Ce « jeu », certes, « n’a pas laissé indemne » la plaignante, qui a choisi d’en sortir en quittant le cabinet dès le lendemain des faits. Cependant, il était consenti, poursuit-il. Et, dans ce contexte, argumente M. Brossolet, rien ne pouvait faire comprendre à Alex Ursulet que « les pénétrations alléguées », que son client réfute, ne l’auraient pas été.

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6 commentaires

  1. Ce procès montre à nouveau que le pouvoir peut parfois être utilisé à des fins particulièrement odieuses. Espérons que la justice fera son travail.

  2. Un verdict lourd pour un procès très médiatisé. Cela rappelle l’importance de la lutte contre les violences sexuelles dans tous les milieux, y compris professionnels.

  3. Antoine L. Martin le

    La défense du doute raisonnable est intéressante, mais les arguments de l’accusation semblent solides dans ce dossier précis.

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