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Coup de tonnerre à l’Assemblée : les députés ont adopté, par 185 voix contre 184, une proposition de résolution du Rassemblement national (RN) visant à « dénoncer » l’accord franco-algérien de 1968, avec l’appui des groupes de la Droite républicaine et d’Horizons. Le vote a eu lieu dans le cadre de la niche parlementaire du RN, qui a la main sur l’ordre du jour de l’Assemblée national jeudi.
« C’est une journée qu’on peut qualifier d’historique pour le RN », s’est aussitôt félicitée la cheffe des députés d’extrême droite Marine Le Pen, soulignant qu’il s’agissait du premier texte de son parti approuvé par l’Assemblée, en dépit des oppositions de la gauche, de macronistes et du gouvernement. Si ce texte n’est pas contraignant juridiquement, sa portée symbolique et politique est haute, alors que les tensions sont toujours vives entre Paris et Alger.
Cet accord, signé six ans après la fin de la guerre d’Algérie (1954-1962), offre aux Algériens des clauses spécifiques en matière de circulation, d’immigration et de séjour en France. Il permet aux ressortissants algériens d’obtenir un titre de séjour de dix ans selon une procédure accélérée. Dans le cadre d’un regroupement familial, les membres de la famille reçoivent également un certificat de résidence de dix ans dès leur arrivée si la personne qu’ils rejoignent possède ce titre.
Les députés RN (122 élus sur 123) et leur allié de l’Union de droites pour la République (15 députés sur 15) ont voté massivement en faveur de ce texte dénonçant cet accord. Sur les 50 élus composant le groupe de la Droite républicaine, 26 d’entre eux ont voté en faveur du texte. Il a aussi été soutenu par 17 députés du groupe Horizons, parti d’Edouard Philippe qui s’est positionné ces dernières années contre cet accord franco-algérien.
« Ils étaient où les macronistes ? »
Dans la foulée du vote, le Parti socialiste et Les Ecologistes ont avant tout critiqué l’absence de Gabriel Attal et de la majorité de ses députés. Sur 92 membres, seuls 30 députés du groupe Ensemble pour la République ont voté contre le texte, tandis que trois se sont abstenus et sept n’ont pas pris part au vote, bien que présents.
Il a, cependant, manqué des voix dans tous les groupes opposés à ce texte, y compris à gauche (52 députés de La France insoumise sur 72 ont participé au vote, 53 socialistes sur 69, 32 écologistes sur 38, 6 députés du groupe communiste et ultramarin sur 17). Douze députés MoDem ont pris part au scrutin (10 contre, deux abstentions) et trois députés LIOT sur 22 (deux pour, un contre).
« Ils étaient où les macronistes ? Gabriel Attal absent ! A une voix près, Horizons (Edouard Philippe), LR et l’extrême droite votent ensemble la fin de l’accord de 1968 avec l’Algérie », a fustigé le patron des socialistes, Olivier Faure, sur X, tandis que la cheffe de file des députés écologistes, Cyrielle Chatelain, a abondé devant la presse : « Cette voix qui nous a manqué pour faire face au Rassemblement national, c’est celle de Gabriel Attal. »
« Un texte raciste voté grâce à l’absence des macronistes », a ajouté la cheffe des députés « insoumis », Mathilde Panot, sur X. « Honte au RN » qui « continue sans fin les guerres du passé », a grondé également le leader « insoumis », Jean-Luc Mélenchon, sur X.
L’équipe de Gabriel Attal s’est justifiée sur cette absence auprès du Monde, en expliquant que ce dernier avait une intervention au forum A World for Travel, à Paris, prévue de longue date. « L’ordre du jour de la niche du RN a changé au dernier moment, ce qui a rendu impossible la présence de Gabriel Attal puisqu’il ne pouvait pas annuler sa participation à cet événement international », justifie ainsi son entourage.
Gabriel Attal a toutefois lui-même appelé à dénoncer l’accord de 1968, en janvier, pour « poser les limites et assumer le rapport de force avec l’Algérie », notamment à l’aune de l’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Mais son groupe s’affichait contre le contenu du texte du RN. Le macroniste Charles Rodwell, auteur d’un récent rapport accablant contre ce même accord de 1968, avait justifié par avance un refus, au prétexte d’un supposé vide juridique qui risquerait de « provoquer un déferlement migratoire » dans l’Hexagone, analyse dénoncée par le RN.
Après ce texte, les députés vont examiner dans l’après-midi une proposition de loi visant à rétablir le délit de séjour irrégulier. Ce délit visant à lutter contre l’immigration illégale avait été supprimé par François Hollande en 2012, en application d’une directive européenne qui interdisait qu’il soit assorti d’une peine de prison.
Les Républicains, qui ont de moins en moins de complexes à voter des propositions venues de l’extrême droite à l’Assemblée, ont sans surprise appuyé le dispositif. Mais, fait rare, les députés Horizons ont, eux, aussi apporté leur soutien à la mesure en commission des lois, ce qui pourrait augurer d’une nouvelle victoire en séance publique pour le groupe d’extrême droite.










9 commentaires
C’est une décision qui soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Les dirigeants sont-ils prêts à en assumer les conséquences ?
La droite républicaine soutient le RN, une alliance intéressante. Quel impact sur le paysage politique français ?
Cela montre un glissement vers l’extrême, mais l’impact reste à voir.
Un vote historique, mais que changerait vraiment l’abrogation de cet accord ? Les Algériens résidant en France seront-ils affectés ?
Marine Le Pen a marqué l’histoire avec ce vote. Que pensez-vous de cette stratégie politique ?
Une manœuvre habile, mais à long terme, cela peut compliquer les relations diplomatiques.
Un pas symbolique, mais les implications juridiques de cet accord restent floues. Quels seront les prochains pas ?
La symbolique est forte, mais les relations franco-algériennes sont bien plus complexes.
C’est une victoire politique, mais concrètement, cela ne change rien pour l’instant.