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L’annulation d’un colloque sur la Palestine par le Collège de France a suscité des remous académiques et politiques, lundi 10 novembre. France Universités, une association qui regroupe les dirigeants d’université, a exprimé son « incompréhension » et sa « vive inquiétude » face à une décision qui « porte atteinte à la liberté académique », selon elle. France Universités « a découvert avec stupeur l’annulation du colloque scientifique “La Palestine et l’Europe : poids du passé et dynamiques contemporaines” », a-t-elle annoncé dans un communiqué. « Les universités doivent pouvoir continuer, à l’abri de toutes formes de pressions extérieures, à promouvoir des débats éclairés par des travaux de recherche scientifique », a-t-elle estimé.
Le Collège de France avait annulé dimanche ce colloque qui devait se tenir de jeudi à vendredi, coorganisé par l’historien Henry Laurens et le Centre arabe de recherches et d’études politiques de Paris (Carep Paris), « en réaction à la polémique entourant la tenue » de l’événement. Le colloque avait été qualifié d’événement « propalestinien » par plusieurs personnalités. « Rien n’allait dans ce colloque », avait notamment réagi sur X Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF). La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), avait, elle, dénoncé une « foire antisioniste », et évoqué le « dévoiement d’une institution prestigieuse ».
L’association avait annoncé vendredi saisir le ministre de l’enseignement supérieur, Philippe Baptiste. Ce dernier a qualifié dimanche sur X l’annulation de « responsable ». « Défendre la liberté académique, c’est défendre un débat libre, respectueux et pluriel », a-t-il souligné.
Critiques de la gauche
Dans une lettre adressée à l’administrateur du Collège de France, Thomas Römer, rendue publique lundi, le sociologue et démographe François Héran, professeur honoraire au Collège de France, a protesté contre cette décision. « Je découvre que, loin d’être l’apanage du wokisme, la cancel culture peut aussi inspirer l’administration du Collège », a-t-il ironisé.
Le principal syndicat de l’enseignement supérieur, le Snesup, a, lui, estimé dans un communiqué que ce colloque devait « impérativement se tenir ». « Faisant l’objet de pressions pour obtenir son annulation, le ministre de l’enseignement supérieur (…) a choisi de céder. »
A gauche, plusieurs élus de La France insoumise (LFI) ont critiqué cette annulation, et la cheffe de ses députés, Mathilde Panot, a écrit lundi une lettre à l’administrateur du Collège de France pour lui proposer « d’organiser ce colloque dans l’enceinte de l’Assemblée nationale ». Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, avait estimé dimanche « inadmissible » cette annulation « après intervention du ministre de l’enseignement supérieur ».









8 commentaires
Je ne comprends pas cette décision. Les universités doivent proposer des débats, même controversés.
Certes, mais il y a des limites à la liberté académique. Certains sujets peuvent déraper si mal organisés.
C’est vrai, mais l’annulation pure et simple n’est pas la solution.
Cette annulation soulève de sérieuses questions sur la liberté d’expression académique en France. Comment un colloque scientifique peut-il être jugé à l’avance comme partial ?
La science doit rester neutre, mais les sujets sensibles/fragiles sont souvent contestés par des acteurs politiques.
C’est inquiétant, surtout quand des événements sont annulés sous la pression de critiques politiques.
Un colloque universitaire annulé par prudence, voilà qui n’augure rien de bon pour le débat intellectuel libre.
Quel dommage de voir ce genre de polémique bloquer la recherche et la réflexion académique.